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Apprendre le deuil? Vraiment?

J'ai lu un jour que ma manière de faire face au deuil dans ma vie est un indicateur de comment je risque de le faire pour mes deuils dans le futur... Ouf. En lisant ça, j'ai pas eu le choix de m'observer et de questionner mes stratégies face à cet enjeu, qui est au cœur de la condition humaine selon moi...


Des deuils on en vit et on va en vivre encore, parce que comme dirait ma précieuse grand-mère, tout passe, même nous! Au départ, on sait bien de notre passage ici-bas est temporaire et que nos expériences ainsi que les gens qu'on a la chance de côtoyer sont des cadeaux qui ont le pouvoir de nous faire apprendre. Et si le processus de deuil avait aussi cette capacité? Qu'est-ce qui explique que l'on veuille l'occulter, le nier ou s'arranger pour le faire passer au plus vite? C'est écrit à quel endroit qu'un deuil « typique » et « normal » doive se faire en tant de temps et d'une telle manière? Et nos deuils qu'on ne prend pas le temps d'adresser, il se passe quoi avec eux?


Comme tout le monde j'ai eu mon lot de deuils... De personnes chères, emportées par la mort, mais aussi des ruptures amoureuses et amicales, des projets avortés, des rêves abandonnés, des renoncements, mais aussi parfois l'impression de devoir faire le deuil d'une partie de moi, tant mes choix étaient désalignés de ce que j'étais profondément et de ce à quoi j'aspirais vraiment... Un peu comme si j'avançais parce qu'il fallait avancer... Par moment, en me sentant désarticulée, mais j'avançais... Par toujours vers moi, mais en m'imaginant qu'aux yeux des autres, j'avais l'air de savoir ce que je faisais et où j'allais... Même dans les moments où j'étais complètement accablée et aveuglée par la tristesse du deuil, j'avais parfois l'impression d'avoir à me faire violence pour pouvoir continuer à avancer et garder une constance... Et un jour, j'ai vécu une grande perte qui a rapporté avec elle tous les deuils que j'avais travaillé fort à enfouir... Comme happée par un ressac d'une violence inouïe, je me suis retrouvée à devoir faire face, un peu comme si à ce moment précis, il était devenu impossible de m'échapper à moi-même...


Sur le cul, mais lucide, j'ai laissé monter les images, les souvenirs, les moments de partage incroyables, les déceptions, les occasions manquées, les saboteurs qui s'étaient trop souvent mis de travers dans mon chemin, les efforts trop peu récompensés, les projets oubliés, les rêves de petite fille, la tristesse, le sentiment de vide et de solitude, la douceur délaissée... J'avais l'impression d'être devant une vague, résolue à la regarder arriver, à lui permettre de momentanément m'immerger en ayant la certitude que ça n'allait pas durer toujours... Parce que la vague, elle a cette constance et cette régularité rassurante... Elle sait d'où elle vient, où elle va et se laisse reprendre... Doucement, elle sait se laisser reprendre dans le grand tout. Elle ne résiste pas, elle suit le mouvement, le courant...


Je me suis donc laissé inspirer par elle et j'ai compris que de me dire des choses comme:

« Mais pourquoi? », «je devrais aller mieux... », « comment ça je suis encore pris là-dedans? », «je suis plus forte que ça... j'en ai vu d'autres... », «si je parle de moi, les autres vont me trouver lourde », «je devrais avoir moins de peine », «je dois m'occuper, je veux pas m’apitoyer », «il faut que je me change les idées » ...


Je résistais ou je cherchais à pousser...


Je n'étais pas dans l'accueil ni le respect de mon rythme.. J'étais dans la résistance et je ne m'autorisais pas à ressentir et me laisser vivre ce qui se passait en moi. Et j'ai compris que je pouvais m'accueillir sans pour autant tomber dans la complaisance ou la victimisation. Que je pouvais m'autoriser

à ressentir et exprimer mes émotions dans la bienveillance et surtout que j'avais tout intérêt à continuer de laisser le deuil m'instruire et m'apprendre que dans la perte, cohabite l'absence, mais aussi l'essence... L'essence de ce qui a été et qui demeure en moi... Parce qu'à bien y penser, au bout du deuil, il reste l'amour... L'amour de soi, des autres et de la vie.

Karine



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